De Ferrières à Obanos : San Saturnino d’Artajona


Une retraite bien gagnée…

Les sonneurs de cloches et carillonneurs sont une “caste” très méritante. Son apostolat est lié à la continuité du temps (qui ne souffre pas de rupture !) et la loi que leur impose sa lecture au rythme des heures, des rituels et des célébrations pour le confort de la communauté humaine que le clocher domine.

Le paradoxe (apparent) veut que dans cette permanence le sonneur rappelle ainsi l’approche de la “Fin des Temps”. L’éternité étant un concept qui ne peut se concevoir qu’avec un début et donc… une fin.

Au premier son frappé sur la robe de bronze – les plus inquiets d’entre nous vérifient aussitôt sa simultanéité avec l’heure indiquée sur leur bracelet-montre -, le clocher semble se redresser, altier, sur les toitures du quartier. Les vibrations s’échappent de ses ouvertures et rabats-sons comme un souffle puissant de quelque taureau en charge pour se répandre dans les rues en se faufilant aux ricochets des façades tout autant qu’il hèle la Nature insouciante dans les champs alentours.

Dans le secret de la chambre haute du clocher de l’église ou du beffroi, la sérénité du carillonneur devant son clavier évoque la plénitude d’un mécanisme d’horloge… Différemment, au sommet des tours de la cathédrale, les sonneurs s’affairent dans une manière de ballet maîtrisé alliant la puissance d’une équipe de dockers, à la précision de cheminots devant la chaudière de leurs loco et à l’agilité de danseurs de jota…

Totalement immergé et pénétré par les ondes qui se succèdent, chacun est acteur involontaire d’un voyage où les sons donnent de la matière quasi palpable à l’air qu’il y respire.

Il faut avoir entendu la Berenguela sonner au clocher de Santiago ! Le son des cloches de la cathédrale.

Ainsi, lors de notre visite à Artajona en septembre 2016 – dans le cadre de “l’hermanamiento” (jumelage) qui lie Ferrières-Renaissance à la Fondation Misterio de Obanos -, nous avions salué María et ses compagnes.

Nous ignorions alors que la grosse cloche de la cathédrale San Saturnino était à veille de prendre sa retraite…

Depuis, les circonstances nous ont aussi révélé le service émérite de quelques uns de nos amis auprès de ces gentes dames dans des clochers élégants de part et d’autre des Pyrénées… Autant dire que nous aurons ici le plaisir d’évoquer à nouveau l’art campanaire, son patrimoine et ses œuvriers.

O.C.

Maria disparue, sa compagne est bien esseulée. Son nom ? Saturnina, en l’honneur du patron d’Artajona.

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